(Extrait du chapitre 35 – Les effluves d’une vie)
— Septembre 2006, Californie —
Le blanc a envahi mes cheveux, ici ou là, le mont de l’âge. Ma peau douce s’est ridée ; crevasses de ma beauté. Il y a si longtemps. Oui, Il y a si longtemps que je l’aime. Le glacier de notre amour n’a jamais fondu. Le brasier sur nos corps ne s’est jamais éteint…
Se souvient-il ?
Évidemment…
L’onde du jour sur mon ventre se posait. Un rendez-vous, un bouquet de frissons. Nue, je l’attendais. Il aimait tant me voir vêtir l’habit de l’amour. Alors je m’asseyais sur le bord du lit et j’attrapais les fourreaux noirs du désir. Poussées par mes doigts agiles et lents, les vagues de satin avançaient sur ma jambe comme des lames iodées sur la jetée les soirs de houle. Ses yeux azur se noyaient dans l’écume noire qui sublimait le haut de ma cuisse comme un délice.
Puis l’autre jambe jouait de lui et le sourire naissait sur son visage.
Je couvrais ma toison noire, j’enfilais ma guêpière aux allures de Vénus, puis j’attachais avec soin le haut de mes bas, en riant de lui, pris dans l’essaim du désir. Je lui offrais l’honneur d’emprisonner délicatement mes tiges de fleur dans leurs vases d’amour sur aiguilles-perce-cœur. Il les cueillait, les respirait, les bisait.
À genoux il me regardait puis ses mains effleuraient mes jambes ensoiées.
Sur mes hauts talons je le dominais du regard, il se laissait couler au pays des envies. Alors ses yeux brillaient dans la rue de l’amour, m’éclaboussaient de rais des encore.
Je luisais comme un bijou de valeur, à ses yeux, j’étais le bonheur.
Alors il m’aidait à agrafer ma camisole d’amour, les rideaux laissaient passer les flèches du jour. Je finissais ce strip-tease à l’envers, par un baiser, une étreinte sans retour.
Je le dénudais, envahi d’émoi, ma danse commençait, pour notre plaisir complice. Puis heureux nous faisions l’amour, la tempête naissait à l’horizon, toutes voiles dehors nous voguions sur la passion.
…….